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Rapport

Luxe & Technologie - Intelligence artificielle : la révolution discrète
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En Bref
Le luxe et l’intelligence artificielle sont-ils intrinsèquement antagonistes ? À première vue, tout semble les opposer. Deux scénarios auraient pu émerger de cette situation paradoxale : un rejet pur et simple du luxe pour l’intelligence artificielle, comme, à l’inverse, une attraction irrésistible, née de la rencontre de ces deux mondes apparemment opposés. La réalité, comme souvent, se révèle plus complexe.
 
 
 
L’adoption des solutions d’intelligence artificielle dans le secteur du luxe, amorcée avec l’IA analytique il y a plus de 5 ans, est encore ciblée et relativement limitée. En moyenne, chaque Maison membre du Comité Colbert a adopté moins de 2 cas d’usage parmi les 20 testés dans notre étude; aucun n’a été adopté par plus de 30% des Maisons. En toute logique, les cas d’usage supportés par l’IA analytique sont en tête des solutions les plus largement déployées.
 
Une forte accélération de l’adoption de l’IA s’amorce pour les 12 à 24 prochains mois. En effet, de nombreux pilotes sont en cours : chaque Maison teste ou planifie actuellement plus de 5 cas d’usage supplémentaires en moyenne.
 
De fortes disparités de niveau d’adoption sont à noter selon la taille des Maisons : 3 fois plus de cas d’usage sont aujourd’hui déployés au sein des grandes Maisons. L’écart devrait néanmoins progressivement s’atténuer (5,8 cas d’usage testés ou planifiés dans les grandes Maisons actuellement, contre 5,3 dans les autres), avec l’appui de l’IA générative, plus accessible et moins coûteuse.
 
Les barrières à l’adoption sont aujourd’hui majoritairement liées à l’expertise et aux ressources (pour ~55% des Maisons), à la gestion des données (pour ~30% des répondants, qui s’inquiètent de la sécurité des données et de leur exploitabilité), ainsi qu’aux risques liés à la propriété intellectuelle, spécifiques aux solutions d’IA générative.
 
Parmi les 4 objectifs stratégiques servis par l’IA – efficience opérationnelle, relation client, équipes augmentées, enrichissement des fonctions créatives – ce sont les cas d’usage liés à l’efficience opérationnelle qui enregistrent les plus hauts niveaux d’adoption : 60% des Maisons ont adopté ou testent des solutions de prévision des ventes reposant sur l’IA et 50% des solutions d’allocation des stocks.
 
L’IA ouvre également de nouveaux champs d’application pour accroître l’intimité entre les Maisons et leurs clients, avec notamment des outils de génération de contenu personnalisé (adoptés ou en test dans 50% des Maisons) ou de segmentation client (44%), au-delà du perfectionnement des solutions préexistantes de clienteling.
 
La réflexion sur les équipes, dont la performance peut être augmentée grâce aux applications d’IA, est elle aussi entamée pour fournir aux collaborateurs des outils qui leur permettent de libérer du temps, et d’engager toute leur énergie sur des tâches différenciantes. Toutefois, l’adoption dans ce domaine reste très limitée à ce stade, en attente de solutions matures du marché.
 
L’utilisation de l’IA au sein du processus créatif est le territoire sur lequel les Maisons restent les plus réservées. Le niveau d’avancement est faible (taux d’adoption de moins de 5%), mais surtout, le taux d’acceptation reste limité. Si certaines Maisons commencent à explorer des applications de l’IA dans ce domaine, ce n’est jamais dans l’optique de remettre en cause le rôle et la contribution du Directeur Artistique, mais plutot d’élargir les champs d’inspiration et faciliter le processus de visualisation des futurs produits.
 
Pour saisir les opportunités de création de valeur liées à l’IA, un certain nombre d’impératifs s’impose aux Maisons : élever l’IA au coeur des priorités du Comité Exécutif, avec une mesure objective et partagée de son impact ; accélérer la modernisation et l’harmonisation des infrastructures technologiques et de données ; renforcer les compétences de gestion de données non structurées ; mettre en place une gouvernance robuste (souvent confiée au Data / AI Office) pour assurer une coordination fluide entre les métiers et la fonction technologique et animer le délicat processus de priorisation et budgétisation de la feuille de route. Enfin, l’accompagnement des équipes (redéfinition des missions, formation, communication, dialogue…) favorisera l’acceptation et l’appropriation au quotidien des outils d’IA.
 
Le potentiel apparaît immense pour le luxe, et le nombre de pilotes en cours permet de tabler sur a minima un doublement à court-terme du niveau d’adoption des cas d’usage. L’enjeu pour chaque Maison est de définir pour elle-même le champ de légitimité et d’application de l’IA, en renonçant proactivement à certains champs d’application, afin de ne pas perdre sa singularité ou appauvrir sa capacité de transmission. L’industrie du luxe est convaincue que l’IA est un outil puissant, mais qui doit rester discret, afin que l’artifice de la technologie reste avant tout au service de l’authenticité, l’exclusivité et l’intimité qui sont les promesses centrales du secteur.
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