AFP
Paris, 12 oct. 2014 (AFP) -
Le premier salon mondial de la filière nucléaire s'ouvre mardi au Bourget, près de Paris, avec des visées sur l'important potentiel du marché de l'atome malgré la catastrophe de Fukushima et les protestations d'ONG écologistes.
Le "World Nuclear Exhibition", qui débutera le jour du vote de la loi sur la transition énergétique à l'Assemblée, mettra à l'honneur, jusqu'à jeudi, toutes les composantes de la filière civile, de l'amont jusqu'à l'aval, du cycle du combustible au démantèlement des centrales en passant par la gestion des déchets et les applications médicales.
Les organisateurs attendent jusqu'à 10.000 visiteurs professionels et près de 500 exposants français et étrangers, des poids lourds du secteur aux petits sous-traitants, qu'ils veulent soutenir dans la conquête de nouveaux marchés.
Ils misent sur une moisson de petits contrats, plutôt que sur des engagements majeurs.
"On ne vend pas des centrales nucléaires comme on vend des avions. Mais il y a beaucoup d'autres contrats, dans des domaines très divers comme la radioprotection, les composants et la maintenance, qui pourraient être signés", espère Gérard Kottmann, le président du WNE.
"Quand on dit +filière française+, on pense Areva, EDF, Alstom ou GDF Suez, mais il y a tout un tissu industriel aux technologies de pointe derrière. Beaucoup des 2.500 entreprises du secteur recensées sont des PME, voire des TPE", souligne-t-il.
La construction de nouvelles centrales a subi un coup de frein après la catastrophe de Fukushima, en 2011 au Japon, mais les perspectives restent prometteuses grâce aux besoins énergétiques de pays développés, à la maintenance et à la nécessaire adaptation des infrastructures existantes aux nouvelles normes de sûreté.
Le "grand carénage" d'EDF aiguise ainsi les appétits. Le groupe prévoit pour 55 milliards d'euros de travaux de maintenance et de modernisation de ses 58 réacteurs français à l'horizon 2025, pour pouvoir prolonger leur durée de vie au-delà de 40 ans.
"C'est un très gros marché. La filière française a prévu de procéder à 110.000 embauches dans les 10 ans à venir pour pallier les départs à la retraite, mais aussi pour faire face aux besoins du marché de la maintenance en France", soutient M. Kottmann.
Outre les grands équipements, il y a les travaux de services. "Ce secteur se porte bien et se portera encore mieux.
C'est lié au vieillissement du parc nucléaire français, mais tous les pays ayant un parc d'un certain âge offrent des perspectives de développement", explique Arnaud Leroi, directeur Energie à Paris du cabinet de conseil Bain & Company.
- Un handicap -
Début 2014, 435 réacteurs étaient opérables dans le monde (en incluant les 50 réacteurs japonais arrêtés), selon la World Nuclear Association (WNA), et de nouvelles installations sont à prévoir.
"Par rapport à la situation prévalant avant Fukushima, des projets ont été différés ou annulés, mais un certain nombre continuent de vivre", indique Colette Lewiner, experte énergie auprès du président de Capgemini, citant les ambitions de l'Arabie saoudite, de l'Inde, de la Russie, de la Turquie ou encore du Brésil.
La WNA estime à 1.200 milliards de dollars (950 milliards d'euros) le montant des investissements dans la construction de nouvelles centrales jusqu'en 2030.
A elle seule, la Chine pourrait ériger 120 réacteurs d'ici à 2030. Sur les quatre réacteurs EPR du français Areva actuellement en construction, deux le sont dans ce pays par EDF.
L'Afrique du Sud, qui prévoit aussi de s'équiper de nouveaux réacteurs, a confirmé vendredi qu'elle s'apprêtait à signer un accord de coopération avec la France pour le développement du nucléaire civil.
L'horizon s'éclaircit aussi en Europe, avec l'approbation par Bruxelles du projet contesté de construction d'une centrale par EDF à Hinkley Point, en Angleterre, qui pourrait inspirer d'autres pays comme la Pologne, estime Gérard Kottmann.
Environ 500 défenseurs de l'environnement, selon la police, ont manifesté samedi à Paris contre le WNE, car ils considèrent l'atome comme un handicap pour la France.
"Le nucléaire est un secteur en déclin face au développement croissant des filières renouvelables. Avec son obstination pour le nucléaire, la France navigue àcontre-courant et se prive de nombreuses opportunités", déplore Greenpeace France.
L'association souligne qu'en 2013, les investissements mondiaux dans l'éolien ont atteint 215 milliards de dollars (170 milliards d'euros), cinq fois plus que ceux du nucléaire.